La Saison des débutantes T6 : Harriet la discrète by Beaton M. C. & M.C. Beaton

Auteur:Beaton M. C. & M.C. Beaton [M.C. Beaton]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2023-10-31T08:42:50+00:00

5

« Il s’élança hors de la pièce, enfourcha son cheval et galopa dans tous les sens comme un fou. »

Stephen Leacock

Plus tard dans la matinée, Amy Tribble entra dans la chambre de sa sœur.

« Il faut vraiment que nous discutions de cette amitié de Harriet pour lord Charles », dit-elle, se laissant tomber si lourdement sur le lit que la tasse de chocolat que tenait Effy tressauta dangereusement sur sa soucoupe.

« Ne sois pas si brutale, Amy ! » protesta cette dernière avec humeur.

Amy se pencha sur le visage de sa jumelle.

« Qu’est-ce que tu as fait à ta figure ? demanda-t-elle. Tu as un curieux cercle de peau blanche tout autour de la bouche. Il te donne l’air d’un chimpanzé. »

Effy posa sa tasse sur la table de chevet, y prit un petit miroir et examina son reflet. Ce qu’elle vit lui arracha un piaillement de détresse.

« Mon Dieu, qu’est-ce que je vais faire ? C’est cette nouvelle pommade dépilatoire. Je l’ai faite moi-même à partir d’un mélange de sulfate de baryum et d’amidon.

– On ne doit laisser ce genre de mixture sur la peau que trois minutes environ.

– Trois minutes ? Amy, je suis certaine que les instructions parlaient de trois heures. Regarde ce cahier, là-bas. »

Amy se leva et alla chercher un gros aide-mémoire bourré de recettes de soins de beauté notées à la main.

« Nous y sommes, dit-elle après l’avoir feuilleté. Trois minutes, c’est écrit très clairement ! Tu devrais t’acheter des lunettes.

– Plutôt mourir que de porter des lunettes ! s’écria Effy. Je vais simplement m’appliquer une couche de blanc de céruse…

– Comme tous les jours, coupa Amy avec malice.

– … et personne ne remarquera la différence. Oui, il faut faire quelque chose au sujet de Harriet et de lord Charles. Les prétendants sensés comme Mr Feathers seront rapidement rebutés si elle se montre sans cesse en compagnie d’un coureur de femmes.

– Pourtant, ce serait un vrai triomphe pour nous, dit Amy avec regret, si nous parvenions à marier une fille de pasteur sans le sou à un richissime aristocrate. Nous deviendrions des célébrités !

– Mais il ne convient pas à quelqu’un comme Harriet. Cela, il faut que tu l’entendes.

– Ma foi… » Amy se mordilla un ongle. « Et si elle lui plaisait vraiment ? Je veux dire, peut-être qu’une magnifique entente est en train de se nouer sous nos yeux, et nous risquerions de tout gâcher en nous montrant trop bégueules à la place de Harriet elle-même ? C’est un mondain blasé, et qu’est-ce qui peut encore intéresser un mondain blasé ?

– Rien du tout, dit platement Effy.

– Si, il y a quelque chose. L’attrait du fruit défendu ! Quand il reviendra, disons-lui que nous n’approuvons pas la cour qu’il fait à Harriet, que c’est une jeune femme beaucoup trop honnête pour lui et qu’il ne doit jamais tenter de la revoir.

– Et s’il nous obéit ?

– Alors, Harriet sera définitivement débarrassée de lui. En revanche, s’il s’obstine, nous devrons en conclure qu’il est sincèrement attiré par elle.

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